Des pistes d’aéroports traversées par des trains

Et si un chemin de fer traversait une piste d’atterrissage ? Notre tour des aéroports insolites continue avec, vous allez le voir, quelques aéroports incroyables où trains et avions se côtoient.

Aéroport de Gisborne

Train qui traverse un aéroport
Aéroport de Gisborne

Bienvenue en Nouvelle-Zélande, et plus particulièrement à Gisborne, une petite ville de 35.000 habitants. C’est ici que cohabitent une piste d’atterrissage et un chemin de fer. L’aéroport comptabilise 4 pistes. 3 sont en herbe, et une seule en dur. C’est cette dernière qui est traversée par les rails. Elle mesure 1310 mètres de long pour 45 mètres de large.

Plan de l'aéroport de Gisborne

L’aéroport accueille quelques lignes commerciales opérées par Air New Zealand Link. C’est la seule compagnie à desservir cet aéroport avec deux lignes régulières, depuis Auckland (37 vols par semaine) et Wellington (15 vols par semaine).

La cohabitation entre les aéronefs et les trains est bien entendu de rigueur. Les trains doivent s’arrêter avant la piste, et demander l’autorisation par radio, au contrôleur aérien, de traverser. Celui-ci, à l’aide d’un commutateur, contrôle une signalisation lumineuse en bord de piste.

Le panneau de signalisation lumineux s’affiche alors en vert si la piste est ouverte, et en rouge si la piste est fermée pour le passage d’un train.

Balisage de l'aéroport
Commutateur des panneaux de signalisation
Et le train alors ?

C’est probablement ce qu’il peut y avoir de plus beau ici. De vieux trains à vapeur et au fioul circulent sur cette ligne. Ici, c’est la locomotive J 1211 Gloria datant de 1939 qui traverse la piste.

Train J 1211 Gloria
J 1211 Gloria

Aérodrome de Manakara

Toujours dans les beaux paysages, nous partons maintenant à Madagascar. Là aussi, la piste d’atterrissage de 1200 x 24 mètres est partagée avec une ligne de chemin de fer.

Train qui passe devant un avion
Aérodrome de Manakara

La ligne de train relie les villes de Fianarantsoa à Manakara. Toutefois, étant donné la vétusté des chemins de fer sur cette île, il faudra compter entre 8 et 12h  de train pour parcourir les 170 km qui séparent les deux villes. Ce temps peut facilement s’allonger allant jusqu’à plus de 20h pour diverses raisons, allant de la simple panne au déraillement.

Le train est là-bas un moyen de locomotion très important, car il dessert de nombreuses villes isolées. C’est pour beaucoup l’unique moyen d’avoir accès au monde extérieur. Si vous êtes plutôt pressés, s’offre alors à vous la solution du taxi-bus ou mieux encore… L’avion !

Aéroport de Peshawar

Attachez vos ceintures, nous décollons maintenant pour un voyage de plus de 6000 km, direction le Pakistan, et plus précisément dans la ville de Peshawar. Tout comme pour Gisborne, les trains devaient obtenir l’autorisation de la tour avant de traverser la piste.

Si les précédents aéroports étaient relativement petits, celui-ci se distingue par la longueur de sa piste, 2.750 mètres. Il accueille environ 90 vols réguliers par semaine, et contrairement aux aéroports vus précédemment, celui-ci accueille surtout des avions moyen-courriers du type Airbus 320, mais aussi des gros porteurs de type A330 et Boeing 777.

piste vue du dessus
Aéroport de Peshawar

Quant à la ligne ferroviaire qui traversait sa piste, il s’agissait de la Khyber stream safari ; une ligne de 52 km créée en 1925 qui reliait Peshawar à la ville de Landi Kotal, à la frontière avec l’Afghanistan. Malheureusement, 2006 signe la fin de cette liaison, gravement endommagée par la mousson.

Impossible de mettre la main sur la moindre photo ou vidéo montrant un train croiser la piste, mais les images satellites sont là… Ouf !

Aéroport de Burnie

Allez, on fait un dernier saut vers pays des kangourous, pour découvrir cette fois l’aéroport de Burnie Wynyard, en Australie. Il était traversé par un chemin de fer sur le seuil de sa piste 23. Un signal lumineux s’allumait en détectant l’arrivée d’un train, et les mouvements d’avions étaient bien entendu suspendus pour permettre leur passage en toute sécurité.

ancien et nouveau seuil de piste
Aéroport de Burnie Wynyard

Pour la petite histoire, le chemin de fer a été construit en 1921, et l’aéroport est venu se greffer dessus dans les années 30. L’exploitation de cette ligne ferroviaire a été suspendue depuis 2005. En outre, et c’est plutôt rare pour un aéroport, sa piste 05/23 a été raccourcie afin qu’elle ne croise plus l’ancien chemin de fer. Les traces sont encore visibles (photo ci-dessus).

Toujours en Australie, terminons sur une petite histoire

Saviez-vous que l’aéroport de Sydney était autrefois traversé par une ligne de chemin de fer ?

Et pour faire toujours plus, la ligne croisait cette fois-ci un taxiway (chemin de roulage qui mènent vers la piste) + une piste (la 04/22). Une fois de plus, et on s’en doute, le rail était là bien avant. En fait, la piste de l’aéroport et le chemin de fer existaient chacun, mais ne se croisaient pas. C’est en 1945 que la piste est allongée et vient alors se superposer au rail existant. A cette occasion, un système de communication est mis en place pour permettre aux trains de communiquer avec le centre de contrôle de l’aéroport.

Et là… c’est le drame !

Parce que le monde n’est pas toujours rose, le 18 juin 1950, un accident se produit. L’aéronef impliqué est un Douglas DC-3, immatriculé VH-BZK. Il transportait 15 passagers  et 3 membres d’équipage.  Il faut savoir qu’il faisait nuit, que la météo n’était pas très bonne, et que les radars de sol n’existaient pas.

Douglas DC-3

Tout est parti d’une erreur du commandant lorsque le contrôleur aérien lui a indiqué la piste en service. Alors qu’ils devaient commencer à partir, ils se sont mis à rouler en direction de la piste 22, celle qui est traversée par le rail, au lieu de la 11 demandée par le contrôleur. Pendant ce temps là, l’officier en charge du passage des trains contacte le contrôleur aérien de la tour pour  demander la permission de laisser traverser un train. Celui-ci accepte sans broncher, puisque l’avion est de toute façon censé rouler vers une autre piste.

Quelques minutes plus tard, le contrôleur autorise le DC-3 à décoller mais avant de s’aligner, le capitaine semble embêté. Les lumières de la piste sont éteintes, et comprend avoir mal compris les instructions du début. Il demande alors s’ils peuvent tout de même utiliser la piste 22 ou la 16. Le contrôleur, confus, leur indique que c’est bien la piste 11 en service. Il allume alors le balisage lumineux, et les autorise à remonter la piste 22 pour se rendre vers la 11 initialement prévue.

Alors qu’ils roulent lentement, mais feux éteints pour ne pas être aveuglés par les réfections de la pluie, le co-pilote s’écrie soudain « HOLD IT !« . C’est à ce moment-là que le commandant aperçoit une masse noire devant. A peine le temps de freiner qu’il est déjà trop tard, c’est la collision.

Plan de l'accident

Le train se constituait d’une locomotive D50, 53 wagons vides, + 1 wagon de freinage. Heureusement, l’impact n’a pas été très violent, et seuls 5 wagons ont déraillé.  Coup de chance pour les personnes à bord du DC-3, seul le co-pilote a très légèrement été blessé. Quant à l’avion, bien qu’ayant subi de gros dommages, sera réparé.

Photos de l'accident du DC-3

Qui est responsable ?

C’est bien le contrôleur aérien de la tour qui a été mis en cause dans cet accident, pour avoir autorisé l’avion à remonter la piste alors qu’il avait déjà autorisé le train à la traverser. Le gouvernement australien indemnisera alors l’exploitant du train, ainsi que la compagnie aérienne pour les frais inhérents à cet accident.

L’année suivante, en 1951, quatre feux de circulation ont été installés pour éviter de nouveau ce type de collision. Enfin, en 1960, le chemin de fer sera déplacé 200 mètres plus au nord, en dehors de l’aéroport.

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